Ugolino di Nerio (documenté entre 1317 Sienne - 1327 Sienne)
1310 - 1320
Tempera sur fond d'or sur bois ; 32,7 x 22,5 cm
Provenance :
Londres, Christie’s, 8 mai 1987 ; Londres, collection privée ; New York, Sotheby’s, 26 janvier 2012.
Exposition :
Trente-trois primitifs italiens (Paris, galerie Sarti, 1998).
Bibliographie :
Joanna Cannon, Religious Poverty Visual Riches, Art in the Dominican Churches of Central Italy in the Thirteenth and Fourteenth Centuries, New Haven-Londres, 2013, 192, p. 215-216 (reproduit p. 215) ; Victor M. Schmidt, Painted Piety : Panel Paintings for Personal Devotion in Tuscany 1250-1400, Florence, 2005, p. 220 et p. 139, note n° 78.
Bibliographie comparative : James H. Stubblebine, Duccio di Buoninsegna and his school, Princeton, 1979.
Ce panneau, dont l’attribution à Ugolino di Nerio avait été confirmée par le professeur Luciano Bellosi peu avant son décès en 2011, est une œuvre extraordinairement raffinée de ce disciple immédiat de Duccio, remarquable par la noblesse des attitudes, l’élégance des lignes, le charme de la couleur. On sait peu de choses de l’activité de Duccio entre l’achèvement en 1311 de l’œuvre majeure de la peinture siennoise, la Maesta (Museo dell’Opera Metropolitana del Duomo, Sienne), et sa mort en 1318 ou 1319. La Maesta avait mobilisé l’atelier et fourni aux différents élèves de Duccio un répertoire commun que chacun allait interpréter à sa manière, parfois difficile à cerner. On trouve à Sienne, jusqu’à la peste noire de 1348, nombre de peintres talentueux, mais peu qui sachent comme ici placer les personnages dans l’espace tout en unifiant la composition par le jeu des regards et des gestes (par exemple le parallélisme des bras des deux saints Jean).
L’œuvre doit dater des années 1310. En effet, les auréoles et la décoration du pourtour ont été réalisées à main levée et non poinçonnées, ce qui n’est généralement plus le cas après 1320. Il s’agit vraisemblablement de la partie centrale d’un petit triptyque de dévotion privée, commandé par le modeste donateur agenouillé face au crâne d’Adam, au pied de la croix. La présence, au côté de la Vierge et de saint Jean l’Évangéliste, de saint Jean-Baptiste, patron de Florence, et de saint Dominique, laisse penser qu’il s'agit de Fra Baro Sassetti, prieur du couvent dominicain de Santa Maria Novella, mort en 1324. Ce couvent florentin possédait déjà la Madone Rucellai de Duccio (Galleria degli Uffizi, Florence) et commanda probablement en 1320, et précisément à Ugolino di Nerio, un polyptyque aujourd’hui perdu. Le personnage de la Vierge, ainsi d'ailleurs que le monticule assez prononcé sur lequel est érigée la croix, sont repris d'un triptyque de Duccio et de son atelier (collection de la Reine d'Angleterre) daté de la première décennie du siècle.
Conformément à son objet, il s’agit plus d’une méditation sur la Crucifixion que d’une simple illustration. La Vierge et les saints sont dans un espace séparé du Christ. Saint Jean-Baptiste frontalement, et sainte Madeleine obliquement, regardent le spectateur et le font entrer mentalement dans la scène. Le fond d’or est d’origine et laisse apparaître la base du bol d'Arménie de couleur ocre orangé. La couche picturale est en bon état. Signe d'une commande importante, le revers était enduit d’une toile de lin et peint en noir.