Eugène Delacroix (1798 Charenton-Saint-Maurice - 1863 Paris)
1833 - 1835
Plume et encre noire ; marque de l'atelier Delacroix en bas à droite (Lugt 838a) ; 26 x 39,5 cm
Provenance :
Paris, collection privée.
Bibliographie :
Maurice Sérullaz, Les peintures murales de Delacroix, Paris, Les Editions du Temps, 1963 ; Lee Johnson, The paintings of Eugène Delacroix : a critical catalogue, vol. V, Oxford, Clarendon Press, 1981, p. 3-31 ; Arlette Sérullaz, Maurice Sérullaz, Inventaire général des dessins, École française : dessins d'Eugène Delacroix, 1798-1863, Paris, Réunion des Musées Nationaux, 1984 ; Eugène Delacroix à l’Assemblée Nationale, Paris, Assemblée Nationale, 1995 ; Loys Delteil, Eugène Delacroix, the graphic work : a catalogue raisonné, San Francisco, Alan Wofsy Fine Arts, 1997 ; Une passion pour Delacroix. La collection Karen B. Cohen, Paris, Musée National Eugène Delacroix, 2009-2010.
On a dit de Delacroix qu’il est « le dernier des Renaissants et le premier des Modernes ». C’est ce que montre magnifiquement cette feuille d’études qui mêle la grâce de Raphaël, la force de Michel-Ange, et (dans l’arc admirable des deux figures convexes du haut de la feuille) la liberté des Danses de Matisse, avec deux générations d’avance...
Le Palais-Bourbon, propriété du Prince de Condé, avait été acquis par l’État en 1827, afin d’y installer définitivement la Chambre des députés. L’hémicycle fut achevé en 1832 et Delacroix se vit confier, en 1833, la décoration du Salon du Roi. C’était la première des commandes publiques qui rythmeraient désormais sa vie : les bibliothèques du Palais-Bourbon et du Palais du Luxembourg, la Galerie d’Apollon au Louvre, le Salon de la Paix à l’Hôtel de Ville (qui brûlera en 1871) et la chapelle des Saints-Anges à l’église Saint-Sulpice. C’est aussi la seule qu’il réalisa sans l’aide de ses élèves.
Plus que les tableaux de chevalet, ces grands décors exigeaient nombre d’études et d’esquisses, du fait de la multiplication des figures et l’insertion de la composition dans une architecture prédéterminée. Comme souvent en art, la contrainte est source d’inspiration créatrice, et beaucoup de ces essais très libres ne se retrouvent pas, ou pas exactement, dans l’œuvre finale.
Le Salon du Roi présente, au-dessus des trois baies en arc-de-cintre de chacun de ses quatre murs, une frise allégorique représentant, respectivement, la Justice, l’Agriculture, l’Industrie et la Guerre. On discerne, dans les frises de l’Industrie et de la Guerre notamment, des personnages très proches de figures de notre dessin. La plus exacte est la figure convexe de gauche, le bras droit tendu au-dessus de la tête, qu’on retrouve au-dessus de l’arc central de la Guerre (ainsi que dans un dessin de la collection Karen B. Cohen exposé au Musée Delacroix en 2009-2010).
Quant à la figure centrale, elle ne se retrouve, à notre connaissance, dans aucune œuvre finie, mais dans un dessin au Musée du Louvre (n° RF 9943), lui aussi en relation avec le Salon du Roi.