Richard Parkes Bonington (1802 Londres - 1828 Londres)
1818
Aquarelle sur papier ; inscriptions « RPB » à la plume et encre brune en bas à droite, « 11 Bonington » au crayon noir au revers ; 12 x 20,5 cm
Provenance :
Londres, Sotheby’s, 14 juillet 1988 ; Londres, collection Ian Craft ; Londres, Sotheby's, « An Exceptional Eye », 14 juillet 2010.
Exposition :
Richard P. Bonington (New Haven, Paul Mellon Center for British Art et Paris, Petit Palais, 1991-1992).
Bibliographie :
Patrick Noon, Catalogue raisonné des peintures, 2008, n° 1, p. 83.
Richard Bonington est mort très jeune, après avoir vécu en France l’essentiel de sa vie d’adulte, mais sa réputation n’a pas connu d’éclipse, du moins en Angleterre. Cette aquarelle exécutée à quinze ans est le premier numéro du catalogue de son œuvre peint, et le premier numéro de l’exposition de 1992 au Grand Palais.
Quarante ans après, son ami Delacroix se souviendrait de lui en ces termes : « C’était vers 1816 ou 1817. Il avait déjà dans ce genre une habileté surprenante. Personne dans cette école moderne, et peut-être avant lui, n’a possédé cette légèreté dans l’exécution qui, particulièrement dans l’aquarelle, fait de ses ouvrages des espèces de diamants dont l’œil est flatté et ravi, indépendamment de tout sujet et de toute imitation » (Correspondance, 30 novembre 1857).
Il est intéressant que ce commentaire s’adresse à Théophile Thoré, le « découvreur » de Vermeer, le premier à exalter la Vue de Delft avec laquelle cette aquarelle, comme plus généralement le mouvement romantique et la peinture hollandaise, partage quelque affinité. Plus intéressante encore la notation finale : « indépendamment de tout sujet et de toute imitation ». Delacroix percevait avant l’heure la qualité abstraite, éminemment moderne, de cette œuvre qui nous évoque Klee, cet autre génie de l’aquarelle : même couleur discrète, même transparence évidente comme une équation résolue.
Un mois plus tard, Delacroix noterait encore à propos de Bonington : « Cette main si habile qu’elle devançait la pensée. » (Journal, 31 décembre 1857). On pense à Keats qui la même année 1817 jette sur le papier le vers célèbre : « A thing of beauty is a joy for ever »… et mourra, lui aussi, à vingt-cinq ans. Ou à Mozart qui au même âge, quinze ans, dans l’ouverture de La Betulia Liberata, « atteint à une vraie grandeur musicale » (H. C. Robbins Landon, Mozart Essays, Londres, 1995). Cette œuvre dans un état parfait est un exemple rare du romantisme le plus pur, le moins poseur, et des possibilités d’un génie précoce.