Francesco Solimena (1657 Canale di Serino - 1747 Barra)
1680 (vers)
Huile sur toile ; 31,1 x 37,8 cm
Provenance :
New York, collection Julius Weitzner, 1950 ; Saint Lawrence, University of Kansas Museum of Art ; New York, Sotheby's, 6 juin 1985 (attribué à Giovanni Battista Rossi) ; New York, collection Paul Ganz ; New York, collection Everett Fahy ; New York, Christie's, 26 octobre 2016.
Bibliographie :
Pierre Rosenberg, « Quelques tableaux inédits du XVIIème siècle français », dans Art de France : Revue annuelle de l'art ancien et moderne, vol. IV, Paris, 1964, p. 299 (attribué à Giuseppe Bartolomeo Chiari) ; Burton Fredericksen, Federico Zeri, Census of Pre-nineteenth-Century Italian Paintings in North American Public Collections, Cambridge, Harvard University Press, 1972, p. 52 (attribué à Giuseppe Bartolomeo Chiari) ; Anthony M. Clark, Studies in Roman Eighteenth-Century Painting, Washington D.C., Decatur House Press, 1981, p. 8 (Sebastiano Conca) ; Nicola Spinosa, Pittura Napoletana del Settecento, Naples, Electa, 1988, n° 13 ; Gabriele Finaldi et al., Discovering the Italian Baroque : the Denis Mahon Collection, Londres, National Gallery Publications, 1997, n° 76 ; Simona Carotenuto, Francesco Solimena : dall'attività giovanile agli anni della maturità (1674-1710), Rome, Edizioni Nuova cultura, 2015, n° A27 (reproduit).
Solimena est après Giordano le grand peintre baroque à Naples. Mais ici, à ses débuts, il est encore sous influence du classicisme romain, teinté néanmoins d'un peu de l'inquiétude (dans le paysage vespéral) et de la fantaisie (dans le détail charmant de la fleur de tournesol qui reproduit comme en contrepartie la chevelure de l'angelot) propres au baroque.
L'évangile apocryphe du Pseudo-Matthieu rapporte que sur le chemin de la fuite en Égypte, pour échapper au massacre des enfants de Judée ordonné par Hérode, la Sainte Famille aurait fait halte sous un palmier (ici relégué au second plan) qui sur l'injonction du divin Enfant, ploie ses branches pour mieux offrir ses fruits, et fait jaillir une source d'entre ses racines. La scène est ici agrémentée de la présence non seulement de l'âne, mais d'un bœuf, dont on peut douter qu'il ait suivi la fuite depuis Bethléem, d'un coq qui peut-être annonce l'épisode de la trahison de saint Pierre, le moment où le Christ, loin de fuir, au contraire affrontera son destin, enfin d'un sphinx métonyme de l'Égypte.
Il existe de cette composition une toile de grande taille (97 x 139 cm, localisation inconnue) et deux versions de petite taille : l'une, sur cuivre, léguée par le grand historien d'art Denis Mahon au Fitzwilliam Museum de Cambridge ; et la nôtre, sur toile, issue de la collection d'Everett Fahy, qui fut conservateur en chef des peintures européennes au Metropolitan Museum et directeur de la Frick Collection. Dans le catalogue de la collection Denis Mahon, Gabriele Finaldi, l'actuel directeur de la National Gallery de Londres, jugeait les deux œuvres « de qualité similaire » et rappelait l'existence d'une gravure de 1724, donc du vivant de l'artiste, basée sur notre tableau (la différence majeure avec la version sur cuivre étant l'absence d'un plateau de fruits dans les mains de l'angelot blond).
Si cette composition a séduit deux grands spécialistes de la peinture italienne, c'est peut-être parce qu'elle illustre admirablement non seulement les confluences du classicisme et du baroque, mais aussi le moment magique, à la fin du 17ème siècle (Nicola Spinosa, le spécialiste de l'artiste, la date des environs de 1680), où éclosent le sentiment de l'intime et celui de la nature, qui tiendront une si grande place au siècle suivant.